Monday, July 25, 2011

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Maître des Esclandres, Dispensateur des bienfaits du crime, Intendant des somptueux péchés et des grands vices, Satan, c'est toi que nous adorons, Dieu logique, Dieu juste !
Légat suradmirable des fausses transes, tu accueilles la mendicité de nos larmes ; tu sauves l'honneur des familles par l'avortement des ventres fécondés dans des oublis de bonnes crises ; tu insinues la hâte des fausses couches aux mères et ton obstétrique épargne les angoisses de la maturité, la douleur des chutes, aux enfants qui meurent avant de naître !
Soutien du Pauvre exaspéré, Cordial des vaincus, c'est oi qui les doues de l'hypocrisie, de l'ingratitude, de l'orgueil, afin qu'ils se puissent défendre contre les attaques des enfants de Dieu, des Riches !
Suzerain des mépris, Comptable des humilitations, Tenancier des vieilles haines, toi seul fertilise le cerveau de l'homme que l'injustice écrase ; tu lui souffles les idées de vengeance préparée, des méfaits sûrs ; tu l'incites aux merutres, tu lui donnes l'exubérante joie des représailles acquises, la bonne ivresse des supplices accomplis, des pleurs, dont il est cause !
Espoir des virilités, Angoisse des matrices vides, Satan, tu ne demandes point les inutiles épreuves des reins chastes, tu ne vantes pas la démence des carêmes et des siestes ; toi seul reçois les suppliques charnelles et les apostilles auprès des familles pauvres et cupides. Tu détermines la mère à vendre sa fille, à céder son fils, tu aides aux amours stériles et réprouvées. Tuteur des stridentes Névroses, Tour de Plomb des Hystéries, Vase ensanglanté des Viols !
Maître, tes fidèles servants à genoux t'implorent. Ils te supplient de leur assurer l'allégresse de ces délectables forfaits que la justice ignore ; ils te supplient d'aider aux maléfices dont les traces inconnues déroutent la raison de l'homme ; ils te supplient de les exaucer, alors qu'ils souhaitent la torture de tous ceux qui les aiment et qui les servent ; ils te demandent enfin, gloire, richesse, puissance, à toi, le Roi des déshérités, le Fils que chassa l'inexorable Père !
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Et toi, toi, qu'en ma qualité de prêtre, je force, que tu le veuilles ou non, à descendre dans cette hostie, à t'incarner dans ce pain, Jésus, Artisan des supercheries, Larron d'hommages, Voleur d'affection, écoute ! Depuis le jou où tu sortis des entrailles ambassadrices d'une Vierge, tu as failli à tes engagements, menti à tes promesses ; des siècles ont sangloté, en t'attendant, Dieu fuyard, Dieu muet ! tu devais rédimer les hommes et tu n'as rien racheté ; tu devais apparaître dans ta gloire et tu t'endors ! Va, mens, dis au misérable qui t'appelle : "Espère, patiente, souffre, l'hôpital des âmes te recevra, les anges t'assisteront, le Ciel s'ouvre" - Imposteur ! tu sais bien que les anges, dégoûtés de ton inertie, s'éloignent ! - Tu devais être le Truchement de nos plaintes, le Chambellan de nos pleurs, tu devais les introduire près du Père et tu ne l'as point fait, parce que sans doute cette intercession dérangeait ton sommeil d'Eternité béate et repue !
Tu as oublié cette pauvreté que tu prêchais, Vassal énamouré des Banques ! Tu as vu sous le pressoir de l'agio broyer les faibles, tu as entendu les râles des timides perclus par les famines, des femmes éventrées pour un peu de pain et tu as fait répondre par la Chancellerie de tes Simoniaques, par tes représentants des commerce, par tes Papes, des excuses dilatoires, des promesses évasives, Basochien de sacristie, Dieu d'affaires !
Monstre, dont l'inconcevable férocité engendra la vie et l'infligea à des innocents que tu oses condamner, au nom d'on ne sait quel péché originel, que tu oses punir, en vertu d'on ne sait quelles clauses, nous voudrions pourtant bien te faire avouer enfin tes impudents mensonges, tes inexpiables crimes ! Nous voudrions taper sur tes clous, appuyer sur tes épines, t'amener le sang douloureux au bord de tes plaies sèches !
Et cela, nous le pouvons, et nous allons le faire, en violant la quiétude de ton Corps, Profanateur des amples vices, Abstracteur des puretés stupides, Nazaréen maudit, Roi fainéant, Dieu lâche !
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La messe du chanoine Docre, in Là-bas, J. K. HUYSMANS, 1891
A l'attention des humains carnivores
pour les végétar(l)iens et en l'honneur de Khera Brasseur

O meurtrier contre nature, si tu t'obstines à soutenir qu'elle t'a fait pour dévorer tes semblables, des êtes de chair et d'os, sensibles et vivants comme toi, étouffe donc l'horreur qu'elle t'inspire pour ces affreux repas ; tue les animaux toi-même, je dis de tes propres mains, sans ferrement, sans coutelas ; déchire-les avec tes ongles, comme font les lions et les ours ; mords ce boeuf et le mets en pièces, enfonce tes griffes dans sa peau ; mange cet agneau tout vif, dévore ses chairs toutes chaudes, bois son âme avec son sang... tu frémis, tu n'oses sentir palpiter sous ta dent une chair vivante ! homme pitoyable ! tu commences par tuer l'animal et puis tu le manges, comme pour le faire mourir deux fois.

Jean-Jacques Rousseau

Monday, May 09, 2011

L'avenir sombre dans le passé dès qu'il a cessé d'être futur. Le présent n'existe pas.

Le Voyageur Imprudent, René Barjavel.