CHASSES LASSES
Mon âme est malade aujourd’hui,
Mon âme est malade d’absences,
Mon âme a le mal des silences,
Et mes yeux l’éclairent d’ennui.
J’entrevois d’immobiles chasses,
Sous les fouets bleus des souvenirs,
Et les chiens secrets des désirs,
Passent le long des pistes lasses.
À travers de tièdes forêts,
Je vois les meutes de mes songes,
Et vers les cerfs blancs des mensonges,
Les jaunes flèches des regrets.
Mon Dieu, mes désirs hors d’haleine,
Les tièdes désirs de mes yeux,
Ont voilé de souffles trop bleus
La lune dont mon âme est pleine.
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HEURES TERNES
Voici d’anciens désirs qui passent,
Encor des songes de lassés,
Encor des rêves qui se lassent ;
Voilà les jours d’espoir passés !
En qui faut-il fuir aujourd’hui !
Il n’y a plus d’étoile aucune :
Mais de la [glace]1 sur l’ennui
Et des linges bleus sous la lune.
Encor des sanglots pris au piège !
Voyez les malades sans feu,
Et les agneaux brouter la neige ;
Ayez pitié de tout, mon Dieu !
Moi, j’attends un peu de réveil,
Moi, j’attends que le sommeil passe,
Moi, j’attends un peu de soleil
Sur mes mains que la lune glace.
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ÂME DE NUIT
Mon âme en est triste à la fin ;
Elle est triste enfin d’être lasse,
Elle est lasse enfin d’être en vain,
Elle est triste et lasse à la fin
Et j’attends vos mains sur ma face.
J’attends vos doigts purs sur ma face,
Pareils à des anges de glace,
J’attends qu’ils m’apportent l’anneau ;
J’attends leur fraîcheur sur ma face,
Comme un trésor au fond de l’eau.
Et j’attends enfin leurs remèdes,
Pour ne pas mourir au soleil,
Mourir sans espoir au soleil !
J’attends qu’ils lavent mes yeux tièdes
Où tant de pauvres ont sommeil !
Où tant de cygnes sur la mer,
De cygnes errants sur la mer,
Tendent en vain leur col morose !
Où, le long des jardins d’hiver,
Des malades cueillent des roses !
J’attends vos doigts purs sur ma face,
Pareils à des anges de glace,
J’attends qu’ils mouillent mes regards,
L’herbe morte de mes regards,
Où tant d’agneaux las sont épars !