lundi, juin 26, 2023

Extraits de "J'aurais pu devenir milionaire, j'ai choisi d'être vagabond", de Alexis Jenni

 A la toute fin de sa vie, écrivant ce qu'il avait vu dans ses voyages, John Muir affirmait, comme un legs de sagesse qu'il faisait à ses lecteurs, comme une leçon de vie après avoir beaucoup réfléchi à la sienne, que d'autres enfances sont possible, moins brutales, avec des adultes plus bienveillants, avec d'autres façons que la raclée pour inculquer l'obéissance, avec tout simplement le respect pour promouvoir le respect.

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Passer par des histoires pour dire la Nature, c'est un état ancien des sciences, qui n'élucide sans doute pas grand-chose des lois naturelles, mais la rend très proche et donne l'impression d'y vivre ; elles permettent d'entretenir des rapports amicaux avec tout ce qui n'est pas humain, et qui pourtant nous accueille, et avec qui nous partageons le monde.

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"Il est étrange que l'on puisse parcourir les forêts sans voir la moindre trace de sang. La plupart des animaux sauvages viennent au monde et le quittent sans que personne ne s'en aperçoive." (John Muir)

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Dans une ferme au fin fond du Wisconsin, un jeune garçon aimait tant la poésie anglaise qu'il en embrassait les pages qu'il lisait quelques minutes par jour. 

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Je lis Muir comme on suivrait un frère ainé, j'imagine l'avoir accompagné parce que je sais ce qu'il fait quand il cherche un endroit où dormir dans les buissons, ou qu'il demande à des gens devant leur maison un peu d'eau, ou un coin abrité. Ses livres merveilleux parlent à mon petit Muir intérieur, qui n'a pas voyagé loin, mais qui connaît le principe du voyage. Ce que j'ai fait petitement, Muir l'a fait grandement, mais ma petitesse comprend sa grandeur.

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L'acte seul compte, car l'acte de dessiner est une forme active de contemplation, une forme de contemplation, une forme de concentration extrême sur deux lieux à la fois, bien qu'ils soient incommensurables : la mine aiguisée du crayon qui glisse sur le papier, et le paysage dans lequel on est assis, c'est la pointe aigüe de la conscience qui s'affole à saisir la totalité. Car la question se pose : comment saisir un paysage ? Le paysage enveloppe, il a un effet puissant qu'il est difficile de définir, il pose une énigme toujours près d'être résolue, mais non, c'est comme un mot sur le bout de la langue, mais une langue qui serait le corps entier. Le geste sur la feuille laisse une trace en lien avec ce que l'on voit, et ce filet crayonné, par une forme d'hallucination, finir par le saisir ; quoi que l'on entende par ce terme. Dans un paysage, on peut ressentir la même inquiétude que Saint-Augustin face à Dieu, ce qui n'est pas hors de propos tant Muir voit tout par le prisme divin : "Tu es plus intime de moi-même, et à la fois Tu me contiens" [...]

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Extraits de Serres chaudes, de Maurice Maeterlinck

CHASSES LASSES Mon âme est malade aujourd’hui, Mon âme est malade d’absences, Mon âme a le mal des silences, Et mes yeux l’éclairent d’ennui...